Les Hip Hop Symphonique ont célébré en grandes pompes leur sixième édition, le 20 novembre dernier. Avec un line-up diversifié mélangeant les genres et les générations, le style hip hop a définitivement pris d’assaut le grand auditorium de Radio France.
Une osmose parfaite
Si les artistes sont naturellement au centre de l’événement, la radio Mouv’, l’Orchestre Philarmonique de Radio France dirigé par Dylan Corley, et la direction artistique brillamment travaillée par Issam Krimi, menaient la danse. Pour Bruno Laforestie, directeur de Mouv’, ce mélange entre cultures musicales entraîne à chaque édition « un décloisonnement des frontières entre leurs différents publics ». La tenue du Hip Hop Symphonique attire de nombreux artistes, puisque de nombreux passages à l’événement ont marqué les mémoires. On se souvient par exemple des performances de Ninho, Soolking ou plus récemment Lous and the Yakuza, qualifiées de transcendantes tant l’orchestre et le rap s’unissaient avec brio. « Le Hip Hop Symphonique est un marqueur de taille dans les carrières des artistes » nous assure Bruno, pouvant même parfois leur donner des pistes d’évolution dans leur propre répertoire musique.
Une organisation prévue pour tous
Sur de nombreux plans, l’événement se distingue d’autres initiatives liées au hip hop. Tenant en effet à pouvoir inclure un public élargi, les équipes font appel depuis 2018 à des interprètes chansonnants. Nous avons pu en rencontrer certains dont Erremsi, qui a pris soin de nous présenter les spécificités du rôle des interprètes en langue des signes française (LSF). Ces derniers sont présents sur la scène en compagnie des artistes, devant traduire le sens des morceaux et les émotions cherchées par l’artiste sans en faire une traduction littérale. Il faut ainsi saisir les références convoquées par les artistes qui performeront, et s’imprégner de leurs codes. Un travail essentiel, qui peut s’apparenter à embrasser une autre personnalité le temps du show. Conscient des difficultés rencontrées par le public sourd, Erremsi confie que les événements hip-hop n’agissent pas toujours suffisamment, sans associer les personnes aux décisions, au contraire du Hip Hop Symphonique.
Au sein de la Maison de Radio France, le hip-hop rassemble des équipes, un auditorium, mais également des techniciens, des ingénieurs du son, des chansigneurs. Pour chapeauter toutes ces équipes, nous retrouvons Issam Krimi, pilier fidèle de l’événement. Ayant vu défiler de nombreux artistes depuis six ans, il a réfléchi et pensé l’adaptation de leurs morceaux pour l’orchestre et l’auditorium. Bavard et détendu, celui-ci avoue avoir dû sélectionner les morceaux, car tous ne peuvent correspondre au spectacle. Il approfondit même en déclarant que « certains artistes rap peuvent être excellents au studio, mais ne jamais réussir à s’imposer sur scène ».
Des artistes passionnés
Pour certains artistes, cette 6ème édition marquait leur première participation à l’événement. En effet, pour Laeti, Selah Sue ou Doria, la rencontre avec l’orchestre était émouvante. Doria nous le confie en avouant qu’après avoir dépassé le moment « casse-gueule », elle a vite trouvé ses repères, elle qui avait l’habitude de chanter sur du piano-voix. Pour la jeune artiste, « chanter avec des nouveaux instruments était très poétique ».
Pour d’autres, l’exercice était devenu presque une habitude, comme pour l’énergique groupe Bisso Na Bisso. Parvenir à regrouper Passi, Lino, Calbo, Ben-J et Mystik était un moyen d’assurer une ambiance dansante et rythmée au sein de l’auditorium. Se chamaillant, s’apostrophant à tout va, Passi nous déclare même « qu’ils partagent des moments en famille, et que c’est toujours joyeux de voyager avec nos créations ». Conscients d’occuper une place unique dans le rap francophone, les regards divergent néanmoins au sein du groupe à propos de la nouvelle génération des rappeurs. Le débat est si intense que la discussion s’éloigne rapidement des enjeux de l’événement pour porter sur l’évolution des liens entre médias et artistes actuels.
En bref, les Hip Hop Symphonique parviennent à créer une atmosphère unique, où chaque public trouve son plaisir à la fois dans les performances et les coulisses, ainsi que dans l’art et dans les rencontres faites dans ce lieu presque irréel.