Pull à capuche et billets mauves : Doums nous laisse sur notre faim

Doums, membre emblématique du collectif L’Entourage, a livré son premier album studio le 26 août dernier : Pull à capuche et billets mauves. Une sortie qui a particulièrement fait parler, puisque le rappeur y a invité pas moins de onze artistes d’envergure. Un casting XXL, des productions de qualité sur fond de concept cinématographique et pourtant, la créativité n’a pas été poussée à son paroxysme. L’opus semble même souffrir d’une sorte de complexe d’Icare.

Une intention artistique percutante

Au premier abord, Pull à capuche et billets mauves promet une créativité conceptuelle et esthétique ambitieuse. Le ton est donné dès le premier extrait, “Movie”, dévoilé le 23 juin 2022. Du titre aux visuels, en passant par les paroles, le single laisse présager un album conceptuel solide autour du cinéma. La pochette, d’abord, met en scène le rappeur au sein d’un cinéma et fait directement écho à une scène du film Taxi Driver. Le clip, lui, est truffé de références à des films cultes : Scarface, Shutter Island, La haine, Shining ou encore The Big Lebowski. Réalisé par Cyril Gaborit, c’est une pure réussite visuelle. S’ajoute à cela un making of pour accentuer le concept de l’album.

Par ailleurs, les deux autres clips issus du projet, à savoir « Stars » (ft. Laylow) et « Mondeo » (ft. PLK), sont réalisés à la manière d’un documentaire vidéo, mettant cette fois en scène la propre vie du rappeur. Les images apparaissent à la fois authentiques et esthétiques.

En parallèle, Doums nous met face à un casting de grande envergure, telle une superproduction hollywoodienne réunissant les plus grosses têtes d’affiche du moment. Parmi celles-ci figurent Freeze Corleone, Laylow, PLK, Nekfeu et le britannique Headie One, entre autres. Le protagoniste principal s’entoure de grands noms pour offrir des morceaux soignés. Mention spéciale aux titres partagés avec Freeze Corleone et Headie One, dont les passe-passe sont plus que réussis. Globalement, chacune des collaborations apporte une couleur différente au projet. Le rappeur de L’Entourage s’accompagne également de producteurs de renom comme Twinsmatic, Kezo ou encore Hugz Hefner, beatmaker du label Seine Zoo.

« Ma vie un film, dans laquelle tu souhait’rais même pas figurer »

Intro

« J’suis dans l’movie. J’suis dans la série, j’suis dans ton Netflix. »

Movie

D’autres morceaux font référence au 7e art, comme le titre « Entre 5 et 7 (freestyle) » qui renvoie au film français Cléo de 5 à 7. Dans ce long-métrage, nous suivons l’héroïne en temps réel, durant deux heures. La référence reste cependant anecdotique puisqu’elle résonne uniquement avec le titre du morceau et donc à l’exercice du freestyle. Cependant, le titre très mélodique ne ressemble pas tellement à cette pratique à proprement parler. Les paroles, quant à elles, ne font aucunement référence au film. De même, les textes de l’album sont globalement creux et déceptifs, au contraire des productions qui sont, elles, à la hauteur des attentes.

« Envoie la Fresh
Plus jamais la hess
On a connu la dèche »

FRESH

Doums aka John Doe

Avec cette variété d’artistes, Doums a su intégrer diverses sonorités tout au long de l’opus, alternant morceaux sombres et d’autres plus ensoleillés. Il y en a pour tous les goûts. Peut-être un peu trop. Si la richesse musicale d’un projet est une composante essentielle pour ne pas lasser l’auditeur, l’identité musicale de Doums peine ici à s’imposer face à ce flot hétérogène d’univers artistiques. La substance du projet, caractérisée par ses textes, aurait pu pallier cela. Mais c’est bien là que la limite artistique de Doums, s’est révélée, faisant immédiatement retomber le soufflet.

A l’écoute du projet, on comprend rapidement que la proposition artistique annoncée n’a été que subtilement appréhendée. Les thématiques abordées sont superficielles et dénuées de toute originalité : argent, rue, drogues et femmes sont les ingrédients proposés. Les paroles se suivent et se ressemblent. Mais surtout, elles ne nous apprennent rien de fondamentalement intéressant sur la vie du rappeur franco-malien. Le fil cinématographique aurait eu le mérite d’être un peu plus étiré, de sorte à narrer la vie du rappeur de 30 ans, de manière un peu plus profonde et plus imagée. 

Du pur divertissement

Pour un premier album studio, Doums aurait pu faire l’effort de se livrer davantage aux auditeurs qui l’ont identifié depuis plusieurs années, mais qui peinent à le connaître plus en profondeur. Une sensation accentuée par la navigation du rappeur auprès de onze autres artistes… D’autant que la onzième piste du projet est essentiellement portée par un autre rappeur : Slkrack. Les morceaux sont bons et efficaces pour la plupart, mais aucun ne sort réellement du lot. Finalement, on trouve une œuvre divertissante et esthétique, mais dénuée de sens. Pull à capuche et billets mauves serait davantage comparable à un Fast and Curious qu’à un plus mémorable Taxi Driver.

Jihane Hadjri

Pacifique est le meilleur album de Disiz.