Risky Business : Les « Princes » de la production underground

On a posé des questions à l’un des collectifs les plus chauds de la scène underground. Leur CV parle pour eux : Laylow, Bitsu, Lala &ce, Retro , Jorrdee, TripleGo et bien d’autres ont tous posé sur les prods des monégasques. Ils ont sorti aujourd’hui un projet sur SoundCloud « NO NEW FRIENDS », on en a profité pour discuter d’album commun, Lala &Ce, Bitsu et de rap. 

Salut les gars, c’est une question qui peut sembler classique, mais pas avec vous. Vous êtes un collectif, vous pouvez vous présenter individuellement et présenter Risky Business ?

Risky Business, c’est le nom d’un film des années 80 avec Tom Cruise qui transforme la baraque de ses parents en bordel pendant qu’ils sont partis en vacances. Nous on fait un peu la même chose sauf qu’on fait pas ça chez nos parents mais plutôt sur Internet, et on bosse pas avec des putes mais des artistes et des potes. On est 3 méditerranéens qui se connaissent depuis longtemps, et notre groupe forme une entité plus qu’un collectif.
À côté de ça, on essaie chacun de faire notre truc. Joe est retourné à l’école pour essayer de casser l’art contemporain. Ciu tape des crawls dans le cinéma expérimental et James est sûrement le prochain Nkf Trackbastard. On a crée le groupe en 2017 juste avant de produire notre premier son avec Bitsu (« Cristal »). On travaille souvent avec des gars comme Luki pour tous les visuels, cover etc.   

   © Allociné

Vous sortez un projet demain, c’est une consécration pour des producteurs d’avoir son propre projet ?

Avec les temps qui courent et le nombre « d’objets perdus » qu’on cumule sur nos disques durs, on s’est dit que ce serait cool de sortir une compilation de tous ces « insortis ». A côté de ça, on bosse sur un vrai projet Risky Business pour le courant de l’année 2020, donc la vraie consécration reste à venir.

L’album s’est fait en famille, tous les artistes présents sur le projet ont déjà collaboré avec vous, où était dans un univers proche (on pense à Sali et Jorrdee), c’était une volonté de rester « entre vous. »

Oui et non. La volonté d’être en famille a toujours été quelque chose d’important pour nous. Mais on ne se ferme pas de porte pour autant, la famille s’agrandit tous les jours.

Vos productions sont destinées majoritairement au rap underground. C’est dû au fait que, dans ce genre-là, on a plus de liberté, de créativité et moins de contrainte ? Ou vous n’avez pas eu l’occasion de placer pour des « têtes d’affiches » ?

En vrai, on a plus l’impression qu’on produit les gens qu’on écoute. Jorrdee Bitsu, Lala, Sali, Retro, Laylow sont des gens qu’on aime écouter depuis le début et avec qui on échange sur les réseaux sociaux.

 ©Shoes-UP

Votre duo avec Bitsu est terriblement efficace, un album en commun est envisageable ?

Oui, ça fait un moment qu’on en parle avec Bitsu. C’est en cours de production, on aimerait le sortir courant 2020. Les termites disent : « Petit à petit cela s’amoncelle ».

 © 6èmesens

Concernant les choix des morceaux pour le projet, ça s’est fait comment ? Il y a des artistes qui manque ?

Le projet est un concentré de notre travail entre 2016 et 2019, on le voit plus comme une compilation plutôt qu’un album. Le processus a été d’envoyer un panel d’instrus aux artistes et de les laisser sélectionner la track qui leur plaisait le plus. Oui il en manque, notamment le duo TripleGo ou Zuukou avec qui on bosse énormément en ce moment.

Vous avez des inspirations ? On sent un côté UK/Cloud notamment dans vos productions, on se trompe ?

On s’inspire un peu de tout ce qui nous passe entre les mains, même de trucs hyper random. Mais on va dire que de base, on est autant fan du travail de Noah Shebib de chez OvO que de celui du drain gang et de YungLean.

Le rôle des producteurs est de plus en plus mis en avant. Croyez-vous en une inversion des rôles, que les rappeurs « travaillent » pour les beatmakers et non l’inverse ?

L’inversion des rôles peut être pas. Par contre, on sent bien qu’en 2020 les gens commencent à comprendre que la plupart des bons artistes sont aussi entourés de bonnes personnes, dont les producteurs d’instrus.

Joelahyene pour toi, faire du rap, c’est une finalité ou tu t’amuses juste de temps en temps ?

Entre les deux. En fait, je pense avoir fait des freestyles sur à peu près toutes les instrus qu’on a faites avant qu’elles ne soit envoyées à quiconque, quand c’est un truc pas mal. J’ai toujours envie de sortir un projet mais je suis en plein master en école de scénographie et j’ai moins de temps qu’avant.

Quel est le morceau dont vous êtes le plus fiers ?

« Docteur lulu » de Zuukou avec Osirus Jack. Parce qu’en plus de l’instru et de la perf de Zuukou, le clip va puiser dans la pop culture en se référant à la série Strip-Tease, ce qui en fait un objet largement accessible, en plus d’être drôle et bien réalisé. Réal qu’on doit d’ailleurs au collectif « You’re so cool » qui font la plupart de ses clips.

Zuukou Mayzie 667 ft. Osirus Jack 667 – Docteur Lulu (Official video) Prod Risky Business

Vous collaborez souvent avec des artistes féminines. C’est un pur hasard ou une réelle envie de les mettre en avant ?

Au départ, ce sont des artistes qu’on écoute. On ne fait pas vraiment la différence entre voix féminines et masculines, même si on a parfois envie d’entendre une voix féminine sur certaines productions, surtout avec les artistes avec qui on collabore, qui ont une certaine marge de manœuvre et avec qui on peut se permettre de tenter des trucs. C’est le cas pour le remix de « Amen » sur la compilation.

 © Youtube

Lala &ce est-elle la prochaine France Gall ?

Lala est un symbole d’une génération qui n’a pas envie de se cacher. J’espère qu’on pourra la comparer aux plus grands dans quelques années, elle mérite ! (Je la comparerais plutôt à Janis Joplin ou Deborah Harris de Blondie)

Souvent, les morceaux que vous produisez deviennent des hits pour les artistes underground, vous expliquez ça comment ?

On a l’habitude de travailler avec des artistes dont l’univers résonne avec le nôtre. C’est ce qui nous motive à toujours vouloir leur donner la meilleure version de notre travail, et ils nous le rendent plutôt bien.

En 2020, il faudra compter sur qui ?

Sur les services de santé, histoire que les gens puissent continuer à écouter de la musique, et que les artistes se remettent à tourner…

Pourquoi avoir mis le projet uniquement sur Soundcloud ? Vous pensez ne pas vous mettre des barrières ?

Comme on l’a dit, ce projet est une compilation. Il était important pour nous de le mettre sur Soundcloud et pas sur les plateformes de streaming étant donné que certains titres sont datés de 2017. Par contre, le projet Risky Business dont on vous parlez plus haut aura sa place sur les plateformes de streams.

Le rap underground se doit de rester tel quel ? Que pensez-vous de la phrase « il y a des artistes qui ne souhaitent pas percer » ?

Tous les artistes souhaitent percer seulement à des degrés differents. Certains voient la popularité comme une mauvaise chose mais restent quand même très a cheval sur les stats. Tandis que d’autres ne regardent pas les chiffres et préfèrent avoir de beaux clips ou de beau bijoux.

Pour écouter le projet : https://soundcloud.com/riskybusinessmusic/sets/no-new-friends

Noé Grieneisen

Lala &ce mérite une carrière à la France Gall.